Monde iranien
Le monde iranien
Le monde iranien (en persan : Iran-e Bozorg, Iran-zamîn) est un terme servant à désigner la région où les langues iraniennes étaient ou sont parlées, ainsi que les régions qui faisaient partie de la Perse et/ou de l'empire Perse.
L'Encyclopedia Iranica utilise le terme Continent culturel iranien, et d'autres noms comme la Grande Perse ou le continent culturel perse ont aussi été employés, particulièrement en Afghanistan et au Tadjikistan.
Traditionnellement, jusqu'à une période récente, l'ethnicité n'a jamais été un critère déterminant de séparation dans ces régions. Richard Nelson Frye dit:
« J'ai souvent souligné que les peuples actuels de l'Asie centrale, qu'ils parlent une langue iranienne ou turque, ont une culture, une religion et des valeurs sociales communes, seule la langue les sépare. »
C'est seulement à l'époque moderne que les interventions coloniales occidentales et l'ethnicité sont devenues un facteur de séparation parmi les provinces du monde iranien. Mais le "monde iranien" était plus un super-état culturel plutôt qu'un état politique.
De manière claire, le "Monde iranien" n'a jamais eu de frontières fixes, ni même de définition précise.
Alors que certaines sources définissent le monde iranien comme incluant les républiques actuelles de l'Iran, de l'Afghanistan, d'Azerbaïdjan et les républiques d'Asie centrale, d'autres sources telles que Richard Nelson Frye donnent une définition bien plus large et le définissent comme ayant regroupé "la plupart du Caucase, de l'Afghanistan et de l'Asie centrale, avec des influences culturelles s'étendant en Chine, en Inde et aux pays parlant une langue sémite."
D'après Frye, "Iran signifie tous les territoires et les peuples où les langues iraniennes sont ou étaient parlées, et où, dans le passé, des cultures iraniennes à facettes multiples existaient."
Qui sont les ancêtres des Iraniens ?
Ayant pour ascendants les Aryens (Proto-Indo-Iraniens), les anciens Iraniens se sont séparés des Nouristanis et des Dardes, des peuples indo-aryens, au début du IIe millénaire av. J.-C.. Ils peuplèrent le plateau iranien (par exemple, les Mèdes, les Perses, les Bactriens et les Parthes), et au premier millénaire les steppes au nord de la mer Noire (par exemple, les Scythes, les Sarmates, et les Alains).
Ce sont des Indo-Européens :
- ils font partie de ce grand ensemble linguistique qui essaima de l'Europe à l'Inde, depuis un foyer originel qui fut peut-être situé au nord de la mer Caspienne. Leur implantation sur le plateau iranien se fit progressivement pendant le 2e millénaire av. J.c.
- Se dit de langues d'Europe et d'Asie qui ont une origine commune, de l'Inde à l'Europe occidentale et au reste du monde par l'Europe (sanskrit, hittite, iranien (le persan), arménien, grec, latin et langues romanes, langues slaves, germaniques, baltes, celtiques…).
Carte du xixe siècle représentant le monde iranien.
En Persan, Le monde iranien est appelé Iranzamin, ce qui signifie "La terre d'Iran". Iranzamin était dans les temps mythiques opposé au Turanzamin, la "terre du Turan", qui était situé dans la partie nord de l'Asie centrale.
Durant la période pré-islamique, les Iraniens distinguaient deux régions principales du territoire sur lesquels ils régnaient; l'un était nommé Iran et l'autre Aniran.
Par Iran, ils entendaient alors toutes les régions habitées par des peuples iraniens anciens. Cette région était beaucoup plus vaste que ce qu'elle est aujourd'hui.
La notion de Iran en tant que territoire (opposé à Aniran) peut être vue comme l'origine de cette notion ancienne de monde iranien.
Plus tard, de nombreux changements intervinrent dans les frontières et les territoires où les iraniens vivaient, mais les langues et la culture sont restées un moyen de communication dans de nombreuses parties du monde iranien.
Afin d'illustrer par un exemple, la langue persane était la langue littéraire principale et la langue de la correspondance en Asie centrale et dans le Caucase avant l'occupation des russes, l'Asie centrale étant le berceau du Persan moderne.
De plus, d'après le gouvernement britannique, le Persan était aussi utilisé au Kurdistan irakien avant le mandat de la Grande-Bretagne entre 1918 et 1932.
Avec l'Empire russe avançant régulièrement vers le sud au cours de deux guerres contre la Perse, les traités de Turkmanchai et du Golestan à propos des frontières occidentales, la mort inattendue de Abbas Mirza en 1823, le meurtre du grand vizir de Perse (Mirza AbolQasem Qa'im Maqam), beaucoup de khanats d'Asie centrale commencèrent à perdre espoir dans un soutien de la Perse contre les armées Tsaristes.
Les armées russes occupèrent les côtes de la Mer d'Aral en 1849, Tachkent en 1864, Boukhara en 1867, Samarcande en 1868, Khiva et l'Amou-Daria en 1873.
Traités et pertes des territoires persans
Traité de Golestan de 1813 : L'Iran perd le contrôle sur de nombreux territoires du Caucase.
Traité de Torkamanchai de 1828 : Signé par Fath Ali Shah. La Russie impériale gagne la souveraineté sur le Caucase.
Déclaration de Paris de 1856 : Signé par Nasseredin Shah. L'Iran perd Herat et des parties de l'Afghanistan en échange de l'évacuation des ports du sud de l'Iran par la Grande-Bretagne.
Traité d'Akhal de 1881 : Signé par Nasseredin Shah. L'Iran perd Merv et des parties du Khwarezm en échange de garanties de sécurité de la part de la Russie impériale.
1893 : l'Iran perd de nouveau des régions proches de la rivière Atrak qui lui avaient été donnée dans le traité d'Akhal. Ce traité fut signé par le Général Boutsoff et Mirza Ali Asghar Amin al-Sultan le 27 mai 1893.
1970 : l'Iran abandonne sa souveraineté sur Bahreïn à la Grande-Bretagne en échange des iles situées dans le Golfe Persique.
Provinces du monde iranien
Asie centrale
"Khwarezm est une des régions de Iran-zamin, et est le lieu d'origine des anciens iraniens, Airyanem Vaejah, d'après le livre antique de l'Avesta."
Tadjikistan
L'hymne national du Tadjikistan, "Surudi milli", atteste de l'identité Perso-tadjike, qui a connu une renaissance après le détachement d'avec l'URSS. La langue Tadjike est pratiquement identique à celle qui est parlée en Afghanistan et en Iran, et les villes tadjikes portent des noms persans, e.g Doushanbe, Isfara (Esfarayen), et Kolyab.
Afghanistan
Les Afghans tirent une grande fierté d'être des proches descendants des Aryens ou, pour être plus précis: Ariana - la prononciation grecque de Airyanem Vaejah en avestique ou de "Aryavarta" en sanskrit, signifiant Terre des Aryens.
Aujourd'hui cette expression en vieux-persan ou en avestique est préservée dans le nom de la compagnie aérienne nationale afghane, Ariana Airlines. Le terme 'Ariana Afghanistan' est toujours populaire parmi de nombreuses personnes dans le pays.
L'Afghanistan faisait partie du Khorasan, et était donc connu sous le nom de Khorasan (avec les régions situées autour de Merv et Nishapur), ce qui en pahlavi signifie "la terre orientale".
L'Afghanistan est là où est située Balkh, ville natale de Rûmi, de Khajeh Abdollah Ansari et de nombreux autres figures de la littérature persane. La langue Dari parlée en Afghanistan est un dialecte très proche du Persan. Elle est largement parlée en Afghanistan6.
Finalement, Nasseredin Shah perdit le contrôle de Herat au profit des britanniques en 1857.
Turkménistan
Lieu d'origine de l'empire Parthe (Nysa). Merv est aussi l'endroit où le calife à moitié persan Al-Mamun a transféré sa capitale, afin de déplacer le centre du califat vers un endroit plus éloigné des terres où la langue arabe était parlée.
La ville d'Eshgh Abad (Achgabat) porte un nom persan signifiant "Ville de l'amour", et, comme l'Iran, l'Afghanistan et l'Ouzbékistan, faisait autrefois partie de l'Airyanem Vaejah.
Ouzbékistan
Les célèbres villes de Afrasiab, Boukhara, Samarcande sont situées ici. De nombreux experts désignent ces villes comme le lieu de naissance du Persan moderne. Les Samanides, qui se réclamaient de l'héritage des Sassanides ont construit leur capitale ici.
Chine occidentale
Les régions du Xinjiang en Chine ont accueilli une population perse et leur culture.
Régions Kurdes
Les régions Kurdes en Irak et en Turquie sont mêlées à la culture et à l'histoire de celle du reste du monde iranien. Les Kurdes et les Lors d'Iran sont répartis dans de nombreuses provinces et seraient des descendants des tribus aryennes de l'antiquité. Ardachîr Ier de Perse était de mère Kurde, originaire de la tribu Shabankareh de la province du Fars.
Nord-ouest du Pakistan
De nombreux vestiges de l'architecture iranienne existent toujours dans cette région (e.g Mosquée Wazir Khan) et plus d'un million de locuteurs du persan oriental vivent encore dans cette région.
L'universitaire Muhammad Iqbal, originaire de Lahore est considéré comme un poids lourd de la littérature persane.
Toutefois, ces régions sont plus considérées comme des terres persanophones plus que des régions directement associées avec le monde iranien.
Régions du Caucase
Des vestiges Sassanides peuvent être vus loin dans le nord, jusqu'à Darband, maintenant en Russie du sud. (les mots Daghestan et Darband sont tous deux d'origine perse).
Ces régions ont été annexées par la Russie impériale au cours des xviiie siècle et xixe siècle. Encore aujourd'hui, ces régions gardent leur identité iranienne, comme on peut le voir dans leurs traditions et coutumes.
Azerbaïdjan
Séparée de l'Iran au milieu du xixe siècle, en vertu du traité de Golestan et du Traité de Turkmanchai. La ville de Bakou (Bad-kubeh) est une autre ville au nom d'origine perse. Le mot Azerbaïdjan lui-même dérivent du vieux-persan "Azar-Padegan" (Atropatan).
Malgré l'annexion de cette région par la Russie impériale, la plus grande partie de l'Azerbaïdjan reste aujourd'hui territoire Iranien.
Arménie
L'Arménie était une province du monde iranien depuis l'époque de l'empire Achéménide. L'Iran possède toujours une minorité arménienne non-négligeable.
Nakhitchevan
Tôt dans l'antiquité, Narseh de Perse fit construire des fortifications dans cette région. Beaucoup plus tard, des figures intellectuelles et littéraires de la période Qajare étaient originaires de cette région.
Le Nakhitchevan a lui aussi été séparé de l'Iran au milieu du xixe siècle en vertu du traité de Golestan et du traité de Turkmanchai.
Géorgie et Ossétie
La Géorgie, ou "Gorjestan" était une province Perse à l'époque Sassanide (plus particulièrement depuis Hormizd IV).
À l'époque Safavide, les liens de la Géorgie sont devenus si étroits avec l'Iran que les géorgiens remplacèrent presque les Qizilbash dans les cours safavides.
Le Persan était même la langue administrative officielle de la Géorgie à l'époque de Shah Tahmasp et Allah-verdi Khan, dont le fameux pont appelé "Si-o-se pol" à Esfahan faisait partie de l'élite géorgienne dans le gouvernement safavide.
La Géorgie était une province perse de 1629 à 1762 quand l'influence russe commença à se faire sentir.
Ce qui vient d'être décrit est particulièrement vrai pour la "Géorgie orientale".
La Géorgie orientale était historiquement liée au sud qui la soutenait, alors que la Géorgie occidentale cherchait son support au nord.
La ville de "Teflis" (aujourd'hui Tbilissi) fut persanisée pendant un moment. Le Qajar Abbas Mirza passa quelque temps dans cette ville.
Finalement, la Perse fut incapable de faire face à la Russie en Géorgie, et abandonna officiellement ses vues sur la Géorgie en vertu du traité de Golestan et du traité de Turkmanchai. Aujourd'hui, la Géorgie s'européanise de plus en plus.
Irak moderne
L'Irak fut autrefois la partie occidentale du monde iranien.
À certaines périodes, cela incluait même ce qui est maintenant l'est de l'Irak, puisque c'est là où la capitale Sassanide était située (Ctésiphon).
Il existe toujours des villes dans l'Irak contemporain dont le nom perse est toujours en usage (e.g Anbâr).
Même après que l'Irak fut arabisé, la présence perse était toujours notable et même dominante à certaines périodes, puisque de nombreux saints chiites sont enterrés à Najaf et Karbala.
Finalement, les Safavides ont perdu le contrôle de ces régions au profit de l'Empire ottoman.
Les peuples d'ascendance iranienne
Tats
Les "Tats" sont un peuple iranien, vivant actuellement en Azerbaïdjan et en Russie (principalement au sud du Daghestan). Les Tats font partie des peuples autochtones d'origine iranienne du Caucase.
Les tats utilisent la langue Tat, une langue du sud-ouest de l'Iran et une variété de persan azerbaïdjanais et russe sont également parlés. Les Tats sont principalement des musulmans chiites, avec une importante minorité musulmane sunnite.
Probablement les ancêtres des Tats modernes se sont installés dans le Caucase du Sud lorsque l'empire sassanide du 3ème au 7ème siècle a construit des villes et fondé des garnisons militaires pour renforcer leurs positions dans cette région.
Parsis
Les Parsis sont la communauté zoroastrienne très unie basée principalement en Inde, mais également au Pakistan. Les parsis descendent des Zoroastriens persans qui ont émigré vers le sous-continent indien il y a plus de 1000 ans. Les données du recensement indien (2001) enregistrent 69 601 Parsis en Inde, avec une concentration dans et autour de la ville de Mumbai (anciennement Bombay).
Il y a environ 8 000 Parsis ailleurs sur le sous-continent, avec environ 2 500 Parsis dans la ville de Karachi et environ 50 familles Parsi au Sri Lanka. Le nombre de Parsis dans le monde est estimé à moins de 100 000 (Eliade, 1991: 254).
Iranis
Au Pakistan et en Inde, le terme «iranien» est venu pour désigner les zoroastriens iraniens qui ont émigré au Pakistan et en Inde au cours des deux derniers siècles, par opposition à la plupart des Parsis arrivés en Inde il y a plus de 1000 ans. Beaucoup d'entre eux ont déménagé pendant l'ère Qajar, lorsque la persécution des zoroastriens iraniens était endémique. Ils sont culturellement et linguistiquement plus proches des Zoroastriens d'Iran.
Contrairement aux Parsis, ils parlent un dialecte Dari, la langue parlée par les Zoroastriens iraniens à Yazd et Kerman. Leurs noms de famille ressemblent souvent aux noms iraniens modernes, mais Irani est un nom de famille courant parmi eux. En Inde, ils sont principalement situés à Mumbai, tandis qu'au Pakistan, ils sont principalement situés à Karachi. Au Pakistan et en Inde, ils sont célèbres pour leurs restaurants et salons de thé. Certains, comme Ardeshir Irani, sont également devenus très célèbres au cinéma.
Ajam (Bahreïn)
Les "Ajam" sont une communauté ethnique de Bahreïn, d'origine iranienne. Ils sont traditionnellement des marchands vivant dans des quartiers spécifiques de Manama et Muharraq. Les Iraniens qui adhèrent à la secte chiite de l'Islam sont Ajam, et ils sont différents des Huwala.
Les Ajams représentent également un pourcentage important de la population des Émirats arabes unis, du Koweït, du Qatar et d'Oman.
En plus de cela, de nombreux noms d'anciens villages de Bahreïn sont d'origine perse. On pense que ces noms ont été donnés pendant le règne safavide de Bahreïn (1501–1722). c'est-à-dire Karbabad, Salmabad, Karzakan, Duraz, Barbar, ce qui indique que l'histoire d'Ajams est beaucoup plus ancienne.
Huwala
Huwala sont les descendants des Perses et des Arabes persans qui appartiennent à la secte sunnite de l'islam. Huwala a migré d'Ahvaz en Iran vers le golfe Persique aux XVIIe et XVIIIe siècles.