Lenj
Les bateaux Lenj, un héritage du commerce du Golfe Persique
Le Lenj, un voilier iranien
Les lenj sont des voiliers équipés de moteurs au lieu de voiles. Ils peuvent avoir un pont ouvert ou semi-ouvert, et varient en taille et en forme selon qu'ils sont utilisés pour le transport de marchandises ou la pêche. Le nom lenj serait dérivé de l'anglais "launch" (lancer), et chacun de ces navires a son propre nom ; pourtant, le nom n'est souvent pas écrit sur le bateau. Ce qui est incroyable, c'est qu'ils sont encore aujourd'hui entièrement construits à la main, en suivant le même processus et en se basant sur les mêmes connaissances qu'il y a des siècles.
Les bateaux Lenj sont présents dans le golfe Persique , dans la mer d'Oman et dans l'océan Indien depuis des siècles. Leurs origines remontent à la première moitié du XVIIIe siècle et nous amènent sur la côte nord du golfe Persique, en Iran. À l'origine, les principaux ports pour les lenjes étaient situés dans la province d'Hormozgan, à Bandar-e Kong, Bandar-e Lengheh et Bandar-e Laft. À Bandar-e Kong, la construction des lenjes a commencé avec la première installation humaine.
Ces voiliers étaient utilisés pour de longs voyages en mer, souvent de plusieurs mois, et les lenjes étaient censés pouvoir naviguer pendant une année entière sans nécessiter de réparations importantes. Ils étaient utilisés pour le commerce, mais aussi pour la pêche et la pêche aux perles. Partant du sud de l'Iran, ils allaient à Mumbai, Bassora et en Tanzanie pour faire le commerce des marchandises. Des lenjes ont même été aperçus en Chine et en mer Méditerranée.
Aujourd'hui, les principaux ports pour les bateaux à lenj sont Gavaneh, Reeg, Qeshm, Kulghan, Darghahan, Ramchah, Dulab et Guran. Les touristes qui visitent l'île de Qeshm peuvent observer les ouvriers en train de construire des lenjes sur le site de l'Unesco de Guran.
La construction des bateaux Lenj
Les bateaux Lenj ne sont pas seulement entièrement construits à la main, ils sont également construits sans aucun plan, en se basant uniquement sur les connaissances et l'expérience des constructeurs. Ces derniers sont appelés « Galaf ». Il faut généralement quelques ouvriers pour construire ces bateaux massifs, environ cinq ou six personnes, et la construction dure environ deux ans, selon la taille.
La construction d'un lenj ne nécessite pas beaucoup de matériaux. Les constructeurs créent d'abord la structure du bateau en bois avant de construire le corps du navire. Le bois qu'ils utilisent traditionnellement vient d'Inde et est appelé bois « sai ». Ils utilisent également différents types de bois, tous résistants à l'humidité, provenant d'arbres tels que le jujubier, l'arbre à baies, le platane, le mesquite et l'arbre à gomme arabique.
Pour fixer les pièces les unes aux autres, ils utilisent des clous et des boulons, et ils appliquent entre les interstices des morceaux de coton imprégnés d’huile de coco et de sésame. Cette technique s’appelle « kalfat kooby » et vise à rendre le bateau résistant à l’eau. Pourtant, au moins une fois par an, les bateaux lenj doivent être réparés car de petits trous sont créés dans le bois par les coquillages, laissant lentement entrer l’eau.
Un patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO
En 2011, l’ UNESCO a inscrit le savoir-faire iranien de « construction et de navigation des bateaux iraniens Lenj » au patrimoine culturel immatériel. Cette mesure vise à préserver ces savoir-faire, traditionnellement transmis de père en fils, et qui disparaissent peu à peu. Non seulement les savoir-faire en matière de construction sont considérés comme un patrimoine mondial immatériel, mais aussi l’ensemble des connaissances traditionnelles autour des lenjes, tant au niveau de la construction que de la navigation.
Cela inclut les techniques de navigation et sa terminologie. En effet, les capitaines de ces navires, appelés Nakhoda, possèdent des connaissances très spécifiques pour pouvoir naviguer en fonction de la position du soleil pendant la journée, et de la lune et des étoiles la nuit. De plus, ils possèdent une connaissance étendue des prévisions météorologiques, basée sur l'observation des vents (chacun d'eux ayant son propre nom), de la couleur de l'eau et de la hauteur des vagues, qui est unique.
Outre les techniques de navigation, le patrimoine mondial immatériel comprend également tout le folklore et les traditions des bateaux lenj. Il comprend la littérature orale sur les lenjs et les voyages dans le golfe Persique, ainsi que les fêtes célébrées, par exemple, lorsqu'un bateau lenj est mis à la mer pour la première fois. La musique joue également un rôle important, car des chants et des rythmes spécifiques sont utilisés aussi bien pendant la construction du bateau par les constructeurs que pendant la navigation par les marins.
C'est tous ces aspects que l'inscription à l'UNESCO tend à préserver, car elle disparaît peu à peu avec la disparition des anciens savants. De plus, les lenjes en bois sont peu à peu remplacés par la fibre de verre, un matériau moins cher mais plus fragile, et la plupart des ateliers de construction ont été transformés en ateliers de réparation ces dernières années.
Comment les voyages en mer ont influencé la culture du Sud Les longs voyages des bateaux lenj dans le golfe Persique, l'océan Indien et la mer d'Oman ont laissé une empreinte importante sur la culture du sud de l'Iran, en particulier dans la province d'Hormozgan et sur les îles de Qeshm et d'Ormuz d'où partaient la plupart des marins. Les hommes quittaient leur foyer pendant des mois, voire des années, pour voyager vers d'autres parties du monde.
Ils échangeaient principalement du blé, des dattes, du poisson séché, du sel d'Ormuz et des perles contre d'autres marchandises en provenance d'Inde et d'Afrique. À leur retour, ils rapportaient avec eux du bois de teck, de l'ivoire et de l'or. Ils apportaient à leurs femmes des tissus et des vêtements colorés d'Inde, qui sont aujourd'hui indissociables des tenues des femmes d'Ormuz.
La cuisine de cette région d’Iran a également été influencée par ces voyages maritimes et diffère grandement de celle des autres régions d’Iran. Les épices apportées d’Inde font partie du mélange utilisé localement dans le sud de l’Iran et connu sous le nom de « bandari ». Ces échanges ont également influencé les dialectes locaux parlés dans la province d’Hormozgan, avec de nombreux mots provenant de l’hindi et du swahili.